Le lycéen, Christophe Honoré

Le lycéen, Christophe Honoré

« Lucas a 17 ans quand soudain son adolescence vole en éclats. » Ces premiers mots du synopsis du film Le lycéen sorti le 30 novembre 2022, avertissent le spectateur d’un évènement brutal qui fait qu’il y aura un avant et un après, ce qui est le propre du deuil.

Christophe Honoré, confie s’être lui-même surpris de réaliser un film sur un moment de sa vie très personnel, la mort de son père lorsqu’il avait 17 ans. Il a confié le rôle de Lucas à Paul Kircher et, chose intéressante, il a lui-même pris le rôle du père. Besoin de (re)trouver son père ?

Revenons à Lucas avec ma lecture toute personnelle de la crise existentielle qu’il traverse suite à la mort brutale de son père. Cette mort vient effracter ses défenses, en pleine période de construction identitaire, dont il a perçu que peut-être son père n’accueillait pas tout. 

Dans cette période mystérieuse qu’est l’intégration de la perte, Lucas part à la dérive dans des comportements de plus en plus violents : « Ma vie est devenue une bête sauvage » confie t-il. Sa mère (Juliette Binoche), son frère aîné (Vincent Lacoste) eux-mêmes pris dans l’onde de choc de cette disparition s’avèrent impuissants à arrêter la lente et inéluctable dégringolade de ce petit frère espiègle et survolté. 

Lucas cherche t-il à retourner contre lui l’image dégradée qu’il imagine avoir donné de lui à son père ? Cherche t-il à tuer, au sens figuré comme au sens propre, l’adolescent à fleur de peau qui a déçu son père ? Finalement c’est Lilio (Erwan Kepoa Falé), colocataire plus âgé de son frère, qui devient un phare dans la nuit d’encre de Lucas. Après sa visite inattendue, Lucas sort du mutisme dans lequel il s’était enfoncé.

Le film de Christophe Honoré montre avec beaucoup de délicatesse et de justesse une lente, très lente reconstruction. Un dispositif du film (plans face à la caméra sur fond noir : séances avec le psychiatre ?) témoigne de celle-ci avec l’émergence d’un récit de ce qui n’était plus que chaos. Déchirant et profondément vivant.

Sylvie Nay-Bernard

15 janvier 2023

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